∞-lecture

(V2.0)

N° 423 · Carnet IX

Les cerfs-volants

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Première publication : 1980

Lu du 13/10/2018 au 06/11/2018, à Rennes, Saint-Saëns

Emprunté à quelqu'un

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« – Bon, je me tais. Je suis le dernier des hommes à te donner des conseils. Je n'ai jamais aimé aimé qu'une femme dans ma vie et comme ça n'a pas marché...
– Pourquoi ça n'a pas marché ? Elle ne vous aimait pas ?
– Ça n'a pas marché parce que je ne l'ai jamais rencontrée. Je l'avais bien en tête, je la voyais tous les jours dans ma tête pendant trente ans, mais ça ne s'est pas trouvé. On ne s'est pas rencontrés. L'imagination vous joue parfois de vrais tours de cochon. C'est vrai pour les femmes, pour les idées et pour les pays. Tu aimes une idée, elle te semble la plus belle de toutes, et puis quand elle se matérialise, elle ne se ressemble pas du tout ou même devient carrément de la merde. Ou encore, tu aimes tellement ton pays qu'à la fin tu ne peux plus le souffrir, parce que ce n'est jamais le bon. »

Paris : 1980, Gallimard, "Folio", N°1467, p. 91.

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« Je cherchais quelque chose à dire, puisqu'il faut toujours recourir aux mots pour empêcher le silence de parler trop fort [...]. »

Paris : 1980, Gallimard, "Folio", N°1467, p. 116.

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« Je savais à présent me moquer de mes excès d'exigence et de mes terreurs tyranniques ; je commençais à comprendre qu'il faut savoir laisser, même à sa raison de vivre, le droit de vous quitter de temps en temps, et même celui de vous tromper un peu avec la solitude, avec l'horizon et avec ces hautes plantes dont je ne connaissais pas le nom et qui perdaient leurs têtes blanches au moindre coup de vent. Lorsqu'elle me quittait ainsi pour aller "se chercher" – il lui arrivait de passer en une seule journée de l'École du Livre à Paris aux études de biologie en Angleterre –, je me sentais chassé de sa vie pour cause d'insignifiance. Je commençais cependant à m'éveiller à l'idée qu'il ne suffisait pas d'aimer mais qu'il fallait aussi apprendre à aimer et me rappelai le conseil de mon oncle Ambroise, celui de "tenir fermement le bout de la ficelle pour empêcher son cerf-volant d'aller se perdre dans la poursuite du bleu". Je rêvais trop haut et trop loin. Il me fallait accepter l'idée que j'étais seulement ma propre vie et non pas celle de Lila. Jamais encore la notion de liberté ne m'était apparue aussi sévère, aussi exigeante et difficile. »

Paris : 1980, Gallimard, "Folio", N°1467, p. 119.

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« Je roulai derrière lui sur mon vélo en pleurant du nez. Les larmes trouvent toujours leur chemin, il ne sert à rien de vouloir les retenir. »

Paris : 1980, Gallimard, "Folio", N°1467, p. 318.

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